Chantal Ducos & Pierre-Benoît Joly - Biotechnologies

Publié le par xman1973

Collection Repères - Mars 1988

A la faveur d'une ballade sur le boulevard Saint-Michel, j' ai aperçu ce livre à 1 euro dans les bacs d'une librairie. Et mes souvenirs de fac de ressurgir.


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La première question du synopsis :

"L'impact des biotechnologies dans les années 1990 sera-t-il comparable à celui de l'informatique au cours des années 80 ?"

Et je me suis dit que ce serait intéressant de voir ce qu'en pensaient les auteurs il y a plus de 20 ans ...


" On prévoit que, grâce aux nouvelles techniques, les maladies virales à antigènes variants pourront êter traitées par vaccin : le paludisme en 1990, le SIDA dans un proche avenir." page 32.

Mais qu'est-ce qui fait qu'on y est toujours pas arrivé ? Le fric peut-être, non ?

" ... la micropropagation in vitro
est aujourd'hui devenue une technique de routine. Elle se substitue progressivement au bouturage traditionnel; permettant d'obtenier plus de milles plantes en un an à partir d'un seul individu, elle présente l'avantage d'un gain de temps, d'un gain d'espace et de l'amélioration de la qualité sanitaire des jeunes plants. Couramment utilisée pour certaines espèces horticoles (orchidées, gerbera ...) ou arboricoles (dont la vigne), cette technique est aussi employée pour produire des plants de fraisiers ou de framboisiers que le jardinier amateur trouve dans le commerce. C'est également cette technique qui, grâce au phénomène de "rejuvénation", a permis de maintenir la culture de la belle de Fontenay, variété de pomme de terrre appréciée dont les souches étaient contaminées par des virus." pages 33-34

Et c'est là toute la frontière entre pour ou contre les OGM !!

Et le cas aussi des brevets qui parait absurde :

" Ces conflits révèlent cependant un problème central dans le domaine des biotechnologies : quelle est l'étendue de la protection qu'on doit accorder à une entreprise qui est la première à avoir déterminé la séquence d'acides aminés d'une substance naturelle ? En effet, il y a là une contradiction entre le caractère naturel de la substance (qui n'est pas inventée, mais découverte) et l'essentialité de la phase de séquençage dans le passage aux applications commerciales. ... l'application des brevets dans le domaine du vivant pose un problème de principe." page 48

C'est comme si un jour on avait breveté la formule E = mc2, que ce serait-il passé ?

Plus loin, les auteurs annoncent les prémices de ce qui est terminé maintenant, mais où en est-on vraiment :


Projet " Human Frontier " au Japon

« Mis en place en 1985, conjointement par le MITI et le STA, « Human Frontier » est un vaste programme de recherche fondamentale en sciences de la vie. Ses principaux objectifs sont …l’approfondissement des connaissances des grandes fonctions humaines … la compréhension de l’organisation fine des tissus animaux et végétaux …

Ce projet suscite de nombreux débats dans les pays occidentaux … méfiance vis-à-vis du Japon quant aux transferts de technologie pirate
. »
page 86

 « De façon analogue au Japon, les USA viennent de proposer un ambitieux projet de séquençage du génome humain, The Human Genome Project … ce projet mobiliserait … 3,5 milliards de dollars et 150 à 300 chercheurs pendant une vingtaine d’années. » page 88


Il faudra que j'approfondisse mes connaissances dans ce domaine, car quand j'ai arrêté d'étudier, le programme Human Genome Project était en cours.



On y voit aussi un grand nom bien critiqué maintenant par les anti-OGM :


L’accord Monsanto – université de Washington.

  « En 1982 … Le contrat « régulation et fonction des protéines et des peptides dans les communications intercellulaires » a été défini de telle manière qu’il soit porteur  de nouvelles perspectives de recherches intéressantes pour l’université et où Monsanto perçoit des domaines potentiellement exploitables d’un point de vue commercial. » page 101

 
Les questions étaient bien là, est-ce bien normal que le privé dirige les recherches fondamentales !!

 
« L’option d’un développement privé des biotechniques a été choisie d’autant plus facilement que, dans cette période de crise, on a tendance à réhabiliter l’entreprise et à critiquer les interventions de l’Etat dans l’économie et que le jeu se joue sur un fond de concurrence internationale accrue. C’est sûrement accorder une trop grande confiance aux mécanismes du marché


La brevetabilité du vivant reflète une transformation de l’éthique

Face aux transformations observées, des mouvements de résistance apparaissent. On a souvent tendance à les taxer de scepticisme, de mouvements « anti-progrès ». Notre société technocratique néglige donc le fait que ce sont des citoyens qui ont envie de comprendre l’évolution du monde dans lequel ils vivent. Des citoyens qui désirent infléchir cette évolution en pesant sur des décisions essentielles qui échappent aux institutions démocratiques. » page 109

 D'où toute la problématique de se situer, déjà à l'époque, pour le commun des mortels.
 Même moi, qui de prime abord aurait soutenu ce développement et ces recherches ai fini par comprendre que dans un monde tel qu'il est, il ne faut peut-être pas être trop idéaliste, et plutôt se méfier de la mauvaise utilisation du résultat des recherches.

Enfin, bien sûr, l'éternel problème éthique surgit dans la partie la plus intéressante du bouquin, finalement. 

 

Le pouvoir sur la nature et l’eugénisme.

« … les nouvelles techniques soulèvent une série de questions nouvelles : peut-on commercialiser les tissus et cellules du corps humain ? … jusqu’à quelle limite de taille humaine peut-on utiliser l’hormone de croissance … ? Que faire des embryons surnuméraires congelés … ? » pages 115 à 120.

Ce bouquin me remet dans le bain, et me rappelle à un autre que j'avais lu il y a 15 ans, et qui, même si c'est un roman, monte bien à quel point l'intervention du privé est un danger permanent.

En conclusion, je recommanderais donc aussi de lire :

Substance B de Bernard Lenteric.

Publié dans Livres

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